00223052019A0024

Dans le Soir du 8 avril dernier, vous remettiez en question les méthodes actuellement utilisées pour considérer le statut d’une personne lors de sa domiciliation au service population de la commune et vous demandiez à la Conférence des Bourgmestres de porter à l’ordre du jour l’épineuse question de l’inscription par les services communaux au registre national des personnes comme isolées et cohabitantes.
Force est de constater que la cohabitation est un mode de vie nouveau, et dans de nombreuses situations une contrainte financière eu égard aux loyers élevés, en particulier à Bruxelles. Si ce mode de vie présente des avantages indéniables, il peut aussi constituer un obstacle aux droits consacrés. Partager son loyer peut donc avoir des conséquences désastreuses sur le montant de l’allocation de chômage, de la pension ou encore sur le taux applicable au revenu d’intégration sociale.
Dans l’état actuel de la législation sociale et suite à l’arrêt de la Cour de Cassation du 22 janvier 2018, il faut entendre par « cohabitation » le fait que des personnes vivent sous le même toit et règlent principalement en commun leurs questions ménagères. La justification de cette différence réside dans la mutualisation des dépenses d’ameublement et autre dans le cadre de la cohabitation permettant de faire une économie. Il faut mais il ne suffit pas que les personnes tirent un avantage purement financier de cette vie en commun. Il faut également analyser dans quelle mesure les tâches ménagères, l’entretien du linge ou la préparation des repas sont réalisées en commun ou non.
Cependant, dans sa dernière version les instructions du SPF Intérieur prévoient de manière assez stricte que pour être inscrit comme ménage isolé au registre de la population, il y a lieu de démontrer l’existence d’autant de cuisines et de salles de bain que de personnes domiciliées. Il s’agit du critère essentiel pour démonter l’existence d’un ménage ou non.
Face ces instructions non conformes au prescrit de la Cour de Cassation, quelles sont les mesures envisagées pour se conformer à la réalité bruxelloise ? A cet égard, quelle est déjà la position du Collège ?
A ce jour, comment les services communaux interprètent et appliquent lesdites instructions ?
Avez-vous eu des retours des autres Bourgmestres ? Ces retours permettent-ils d’imaginer un consensus ?
Je vous remercie pour vos réponses.
Stéphanie Paulissen
Conseillère communale - LB
  • Réponse de Madame Sophie de Vos - Bourgmestre f.f.
Vous avez entièrement raison : la dernière circulaire en date émanant du SPF intérieur ne tient absolument pas compte de l’arrêt de la cour de cassation du 22 janvier 2018 qui précise une fois pour toutes que pour qu’il y ait cohabitation il ne suffit pas d’habiter sous le même toit mais qu’il faut partager principalement les charges du ménage.
Comment voulez-vous qu’une commune puisse gérer cela ?
Il ne nous est tout simplement pas possible, lors de l’enquête de domiciliation, et pour une situation qui vient de commencer dans le temps, de déterminer qui partage ou non principalement les charges du ménage, qui fait les courses, la lessive ou prépare les repas…
Et compter, comme le souhaite le SPF Intérieur, le nombre de cuisines ou de salles de bain ne change rien à cet état de fait.
A Bruxelles, un appartement sur 7 fait déjà l’objet d’une colocation. Ce phénomène va forcément aller crescendo. Les nouvelles façons d’habiter ensemble sont souvent sous-tendues par une nécessité sociale ou de solidarité intergénérationnelle (habitats kangourou, un toit 2 âges etc). On ne compte déjà plus les cas absurdes de personnes qui, optant pour la co-location pour s’en sortir, se retrouvent privés d’une partie importante de leurs ressources car ils sont inscrits comme cohabitants avec des gens qu’ils ne connaissent même pas !
Notre rôle consiste à vérifier :
  • La réalité de la domiciliation,
  • La salubrité des logements et les conditions de vie décentes de nos citoyens.
Et non pas à « deviner » qui est cohabitant ou isolé, puisque comme expliqué ci-dessus il est impossible de trancher entre ces 2 notions lors d’une enquête de domicilation.
C’est aux administrations octroyant les aides de vérifier la réalité de la situation des ménages.
Donc, pour répondre à votre question et devant la persistance des instructions émanant du spf intérieur, malgré la jurisprudence récente - ce que nous traduisons comme étant un refus de vivre avec son temps et d’adapter la législation aux nouvelles façon d’habiter ensemble - nous avons décidé :
  1. de prendre des décisions de domiciliation ne respectant pas les directives du SPF Intérieur mais se conformant à la jurisprudence de la Cour de cassation
  2. d’adopter un règlement fixant le rapport à établir par les services de police qui ne contient pas de mention tranchant le statut d'isolé ou de cohabitant (cela relève de la responsabilité de la commune).